Le réseau PAT des Hauts-de-France renforcé par son séjour à Montpellier
Mis à jour le 9 janvier 2025
Comme lors des deux éditions précédentes, les Hauts-de-France étaient largement représentés aux Assises territoriales de la transition agro-écologique et de l’alimentation durable 2024. Une délégation de 18 personnes, portée par la Draaf et le Cerdd, et regroupant chargé·es de mission et associations, s’est déplacée du 1er au 4 décembre à Montpellier. Un voyage apprenant qui n’a pas manqué de développer les liens entre les participant·es sur les questions de l’alimentation.
Alors que le soleil de décembre perce facilement à travers les nuages, une foule se presse vers le Corum, palais des congrès de Montpellier situé en plein cœur de la ville. L’amphithéâtre principal du bâtiment est plein à craquer. On se sert dans les fauteuils, sur les côtés, à l’étage, tout près de la scène. Nous sommes aux Assises territoriales de la transition agro-écologique et de l’alimentation durable. Plus de 800 personnes, venues de toute la France, assistent à ce temps fort de l’année.
Parmi le public, le nord de la France est particulièrement bien représenté. Une vingtaine de personnes assiste à l’événement dans le cadre d’un voyage apprenant organisé par le Cerdd et la Draaf Hauts-de-France. Chargé·es de mission projets alimentaires territoriaux (PAT), membres d’associations et plus largement acteur·rices de l’alimentation durable, tous·tes sont là pour faire le plein d’inspiration pour leur territoire, échanger sur les bonnes pratiques, partager leurs expériences.
Tout de suite, on entre dans le vif du sujet. La plénière d’ouverture permet d’aborder de front la thématique de l’alimentation durable sous toutes ses facettes : formation, foncier, ressource en eau, biodiversité, santé, restauration collective, structuration des filières… Le thème de cette année : accélérer les transitions !
« De nombreuses choses se font déjà à travers les territoires dans toute la France, souligne Delphine Bonamy, adjointe à la maire de Nantes et conseillère métropolitaine en charge de l’agriculture, de l’alimentation et des forêts, qui rappelle qu’il y a aujourd’hui en France 440 PAT. Si on oriente bien les soutiens publics, on a les leviers pour faire bouger les choses ! »
Vers un système alimentaire plus soutenable : les territoires en action
Isabelle Touzard, vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole présente quant à elle la Déclaration des Assises, qui appelle à un modèle plus soutenable (retrouvez-la sur le site des Assises). Une transition indispensable quand « 8 millions de personnes en France sont aujourd’hui en situation d’insécurité alimentaire et que, dans le même temps, 30 % des aliments sont gaspillés, dans un système alimentaire particulièrement exposé aux impacts du changement climatique », rappelle Clotilde Bato, déléguée générale de SOL, Alternatives Agroécologiques et Solidaires. Pour elle, l’accélération des transitions passe par trois solutions :
- faciliter l'installation des nouvelles générations ;
- accompagner des pratiques plus durables ;
- révolutionner les modèles alimentaires.
Et comme on le disait, des projets sont déjà à l'œuvre dans les territoires : en France, plus de 35 initiatives pour une sécurité sociale de l’alimentation (SSA) ont été lancées, faisant le lien fort et indissociable entre alimentation, justice sociale et implication citoyenne. C’est le cas à Montpellier, une des villes pionnières en la matière, qui a lancé il y a plus de deux ans une expérimentation pour une caisse commune de l’alimentation (découvrez le dispositif sur son site dédié).
Visites de terrain inspirantes
L’après-midi a laissé la place aux ateliers permettant d’approfondir certains sujets ; un premier sur le foncier public et les outils de protection adaptés pour pérenniser la vocation nourricière des terres, un autre sur les échanges et comparaisons inter-régionales et internationales sur les trajectoires des systèmes agri-alimentaires territoriaux, ou encore un autre sur la santé et les dispositifs innovants pour une alimentation saine et durable, pour n’en citer que quelques-uns.
Le Cerdd co-animait lui-même, aux côtés d’Extracité, de Douaisis Agglo et des Essaimeurs, l’atelier « Mise en récits et portage politique des initiatives de transition : des clés pour l’engagement des parties prenantes ? » qui a remporté un franc succès d’après les premiers retours des participant·es.
D’autres chargé·es de mission sont allé·es sur le terrain affronter quelques moustiques sudistes et découvrir, les pieds dans la terre, des initiatives locales : La Cagette, supermarché coopératif et participatif, ou encore Oasis Citadine, une association qui porte un projet de permaculture et agroforesterie en milieu urbain.
En fin de journée, les paysan·nes producteur·rices de l’Hérault ont investi le Corum pour régaler les convives avant que ces derniers assistent à un spectacle burlesque dénonçant les dérives de l’industrie agroalimentaire.
La soirée s’est ensuite ouverte au grand public avec une dernière conférence accueillant Perrine Bulgheroni de la ferme du Bec Hellouin, Salomé Saqué, journaliste économique, Laurent Cherchi, chef du restaurant étoilé Reflet d’Obione et Nicolas Bricas, socio-économiste de l’alimentation. Un débat qui proposait de plonger au cœur de nos assiettes pour décrypter les leviers d’action à notre portée : formation, fermes coopératives… plusieurs pistes ont été évoquées devant une salle toujours comble.
Un repas pour 800 personnes, au bilan carbone exemplaire
Après une première journée pour le moins enrichissante, le réveil se fait aux aurores pour les chargé·es de mission qui ont choisi les visites de terrain. Découverte de la cuisine centrale et présentation de la future cité de l’alimentation, balade au cœur du site emblématique d’Agropolis Lavalette ou encore exploration de l’un des plus grands espaces test agricoles de France. Les visites ne manquent pas d’inspirer certains des membres de la délégation Hauts-de-France pendant que d’autres sont en atelier.
L’heure de reprendre des forces tombe à pic. La cuisine centrale de Montpellier a relevé le défi – haut la main ! – de confectionner un repas pour 800 participant·es qui a su ravir les papilles des participant·es des Hauts-de-France avec des produits de qualité et de proximité ! Cerise sur le gâteau, le bilan carbone, clairement affiché, se situe en dessous de celui d’un repas moyen français. De quoi inspirer l’ensemble des acteurs présents dont beaucoup travaillent sur les questions de restauration collective dans les territoires.
Approche systémique de l’alimentation
Retour aux sources dans l’amphithéâtre dès 14 heures pour tous·tes les participant·es. La plénière de clôture débute avec des étudiant·es de l’Institut Agro Montpellier pour faire l’état des lieux de ce qu’ils et elles ont retenu des ateliers. L’exemple des fermes municipales semble les avoir particulièrement marqué. La commune de Mouans-Sartoux est bien sûr dans tous les esprits. Comment adapter ce concept en tenant compte des spécificités des territoires ? La question est sur toutes les lèvres.
Pour Isabelle Touzard, ces Assises et leur qualité montrent qu’une expertise se crée dans les collectivités : « On fait la démonstration que c’est possible, qu’on peut allier les questions de l’eau, de l’alimentation, du social… Cela nous légitime pour interpeller les politiques, notamment au niveau européen. »
L’approche systémique s’invite à nouveau lorsque la santé est évoquée comme prisme indispensable pour aborder les questions alimentaires dans les territoires. Une piste à déployer largement afin de mobiliser le plus grand nombre, au-delà des pratiques culturelles et politiques. Agriculteur·rices, personnel de santé, futurs parents sont en première ligne pour parler d’alimentation sous cet angle, mais plus globalement chacun·e est en effet soucieux·euse de sa propre santé. À Strasbourg par exemple, le dispoditif Ordonance verte permet de fournir, sur ordonnance, un panier de produits biologiques aux femmes enceintes afin de limiter l’impact des perturbateurs endocriniens.
Autre levier puissant pour faire évoluer les pratiques en matière d’alimentation : la commande publique à travers la restauration collective. Là aussi, des initiatives intéressantes existent mais sont très dépendantes du modèle de restauration de chaque territoire. L’évolution du cadre de la commande publique est au cœur de la problématique : comment le faire évoluer ou sur quel levier agir pour introduire davantage de produits locaux durables dans les restaurations collectives ? Certaines associations comme France Urbaine travaillent à faire évoluer les choses sur ce plan.
Au sortir du Corum de Montpellier, le soleil de fin d’après-midi aide les membres de notre délégation régionale à intégrer doucement l’énergie, l’envie et la détermination absorbées durant ces deux jours… Rien de tel qu’une soirée conviviale dans l’ambiance intimiste du Café Joyeux, à deux pas de la place de la Comédie, pour atterrir en douceur. Les discussions et autres débriefing fusent, mais déjà Olivier Lepillier et Élodie Valette, sociologue et géographe au Cirad rejoignent le groupe. Il et elle viennent nous présenter, autour d’un apéritif, la méthode d’évaluation de projets alimentaires durables qu’ils ont mis sur pied : la méthode Urbal.
Écoutez Élodie Valette nous expliquer le fonctionnement de ce dispositif :
La méthode Urbal - interview de Élodie Valette
Durée: 01:26
Retour dans le Nord avec des méthodes et initiatives inspirantes dans les bagages
Réveil en douceur pour ce dernier jour au cœur de la capitale de l’Hérault. La délégation atterrit au café La Gazette, gonflée d’énergie et d’envies. On se rassemble pour faire le bilan de ce qu’on a retenu de ces Assises. Les chargé·es de mission PAT réagissent à vif : « On se rend compte, en voyant des initiatives qui se font ailleurs, que nous aussi, sur notre territoire, on avance à notre rythme, parfois avec un autre budget. Ça a un côté rassurant. »
Des méthodologies qui pourront être adaptées et déclinées dans leurs projets, la prise de conscience de la transversalité des questions alimentaires à l’échelle de leur territoire ou encore de la nécessité de lancer l’évaluation du PAT dès le départ… chacun·e repart avec des exemples qui se traduiront sans aucun doute en actions concrètes sur son territoire.
Une fois encore, ressort le besoin d’échanges et de liens entre les territoires, entre chargé·es de missions, entre élu·es. « En voyant les initiatives présentées lors de ces deux jours, on se rend compte que dès que les élu·es sont impliqué·es, le projet fonctionne ! »
En un mot, la délégation alimentation des Hauts-de-France sort de ces assises de l’alimentation REBOOSTÉE pour agir dans les territoires et renforcer la dynamique du réseau PAT des Hauts-de-France.